Carnets

Café con leche

La tasse de thé traîne sur la table en verre qui me sert de bureau depuis quatre semaines. Je n’ai pas fini d’écrire, je n’ai pas fini de lire. Les jours vont s’écouler lentement avant de pouvoir goûter à nouveau à la joie de déguster un café en terrasse au soleil. Avant j’aurais parlé du plaisir de sentir la tasse chaude contre ses doigts, humer l’arôme du bon kawa, regarder la fumée s’envoler. Oui ça sera une joie, pas un simple plaisir. J’ai entendu hier le témoignage d’une dame pour qui les promenades à Conleau prenaient une saveur particulière depuis qu’elles sont contraintes dans le temps. Elle s’assoie sur un banc, son regard s’arrête sur ce qu’elle ne voyait plus. Une drisse qui claque, le frisotti du vent sur la mer, l’air marin. Elle me rappelle un arabica consommé à Madrid un matin d’hiver. J’avais pris place sur une table sur le trottoir qui fait face à la fontaine de Neptune à proximité du musée du Prado. Une heure offerte sans contrainte. Où allaient mes pensée alors que je regardais amusé un marionnettiste ? Avais-je conscience du petit bonheur que j’étais en train de vivre ? Depuis un mois la lecture de la nouvelle Le Songe de Vercors ne cesse de me laisser sidéré. Pouvais-je imaginer quand je citais le texte pour illustrer les flyers invitant à une soirée cinéma thématique à l’Ecole Centrale de Nantes, que je connaitrais ce sentiment de plaisirs perdus à mon tour ?

Je viens d’apprendre le décès de Luis Sepulveda, emporté par le Covid-19. Il avait soixante-dix ans. L’information écrite en lettres de sang sur le direct de 20minutes.fr m’a pris à froid. Choc, uppercut. Les larmes qui jaillissent. Etouffement. C’était un étranger bien sûr mais un étranger qui écrivait et que je lisais. Je crois me souvenir de la découverte du Vieux qui lisait des romans d’amour au détour d’une conversation. Première lecture, première rencontre avec un auteur que je place dans mon Panthéon des écrivains morts ou vivants. Le titre de son dernier roman sonne curieusement, La Fin de l’histoire. Il vient de rejoindre les 19 000 personnes déjà décédées du virus en Espagne. […]

📖 Ce texte est un extrait de mon livre PRÉLUDE.

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