Chroniques d'une épidémie

La vie sans pass

Dimanche 3 octobre. Passage éclair au Monoprix. Si j’habitais Paris j’aurai indiqué le quartier, ici pas besoin. Monoprix, tout le monde comprend. Il n’y en a qu’un coincé entre l’avenue Victor Hugo, la rue du Mené et la rue de la Coutume. Trois rue, trois noms, trois histoires. Je ne reviendrais pas sur la première, tout le monde connait. La seconde, voulant dire colline en Breton, tire son appellation de la topographie des lieux. Le tracé sinueux de la dernière révèle son origine médiévale dont elle est le seul vestige inserrée dans un tissu urbain vieux de moins de 200 ans. Curieuses choses que la toponymie qui dévoile tantôt l’emprunte du passé, tantôt une volonté naïve d’y ancrer des quartiers tout juste sortis de terre. Ainsi voit-on fleurir des plans dont on dirait qu’ils sont une copie de ceux du Louvre ou du Prado. A Vannes, l’avenue Paul Cézanne voit déboucher les rues Claude Monnet, Eugène Delacroix et Edgar Degas, tandis que la rue Marie Laurencin se fait plus discrète succédant à la rue Henry Moret, peintre post-impressionniste né à Cherbourg en 1856 et mort à Paris en 1913.

Une autre rue vannetaise attire les regards depuis plusieurs semaines qui voit chaque samedi démarrer les cortèges s’opposant au pass sanitaire : la rue Thiers. Paradoxe : Adolf Thiers réprima dans le sang l’insurrection de la Commune. Se méfier du prénom ! Le boulevard de la résistance ne borde pas hélas le centre ville. On aime bien en France faire l’apologie des résistants morts pour le pays, on a plus du mal avec ceux encore vivants. Le chef de l’état allant même jusqu’à créer une commission sur le complotisme  présidée par le sociologue Gérald Bronner. Faut-il rappeler le curiculum vitae de Bronner membre du Conseil scientifique d’Areva, du conseil médical d’EDF, délégué du syndicat patronal de la métallurgie ? Les semaines se suivent, la résistance ne faiblit pas. La manière de mener le combat est-elle pour autant la bonne ? Rien ne semble bouger à part les chiffres épidémiques qui indiquent que le covid entre désormais dans la catégorie des virus endémiques qui n’empêchent ni la Terre de tourner rond ni les hommes de vivre librement (1). Ce point de vue n’est pas partagé par nos gouvernants. Les mesures liberticides se multiplient empêchant même de vivre normalement les enfants de plus de 12 ans s’ils n’ont pas un « parcours vaccinal complet ». Vaccination que l’on sait particulièrement dangereuse pour ces jeunes qui n’ont quasiment aucun risque de contracter un covid grave. Chaque jour apporte son lot de myocardites ou de décès que les pouvoirs publics essaient maladroitement de dissimuler.

Depuis 2 mois j’apprends à vivre comme un paria. Exit bars, terrasses, restaurants, cinémas, golf, théâtres. Fini le café du matin face au port. Je pourrais ceci-dit. Je ne pense pas qu’on me demanderait quoi que ce soit. Ai-je vraiment envie de boire un café entouré d’un cordon sanitaire qui marque la zone où le pass est obligatoire pour toute personne à partir de 12 ans et 2 deux mois ? Reprendre mes vieilles habitudes, m’octroyant au passage un pass-droit parce que je suis connu et que la patronne de l’Océan m’aime bien, serait contraire à mes convictions. Il y a quelques semaines, Florence K. dont j’admire le courage et les prises de position, est venue vers moi pour me demander mon avis. Elle était ennuyée, partagée entre ses obligations à la librairie d’organiser des conférences et d’accueillir des auteurs d’une part, et d’autre part ses réticences à trier les lecteurs en fonction de leur sérologie. Ma réponde fut simple : « Florence, il faut vivre debout ».

Vivre debout. C’est que je tente de faire. Après tout ce n’est pas la mer à boire : quelques semaines, quelques mois sans vie sociale. Ce n’est ni le cachot, ni le goulag ni la mort. Aucune bombe ne vient tomber sur nos têtes qui obligerait à se précipiter dans les caves. Et pourtant. Pourtant raisonnent curieusement ces mots de Vercors que je me plais à réciter à mon fils le regard souvent embué : « Et le soleil dans la rue, la tiédeur d’une alcôve, le maigre jambon du marché noir continuaient d’avoir pour vous une présence autrement réelle que des cris d’agonie de ceux dont quelque part on brûlait les pieds et les mains. » Les premiers jours étaient plutôt amusants. C’était l’été, les pic-nics s’improvisaient au soleil face à des terrasses vides où nous regardions médusé des serveuses zélées scanner les QR codes de clients dociles. Certains exigeaient même le contrôle de leur précieux sésame lors même que rien ne leur était demandé. Le mal s’est répandu au fil des vaccinations. Nous n’étions plus en Bretagne, mais à Wuhan, aux portes du contrôle social global sans que cela n’émeuve une importante partie de nos concitoyens prêts à tout pour avoir l’impression de revivre comme avant. Qui est libre ? Eux ? moi ? Personne pardi ! N’est pas Edgar Morin qui veut qui tweetait le premier octobre : « On est en régression. mentale, intellectuelle, politique sociale laquelle est en cours vers une société de surveillance et d’obéissance dont il y a déjà un modèle concret. » Régression mentale et intellectuelle : tout est là.

Petit à petit la possibilité d’une abrogation de la loi sur le pass sanitaire le 15 novembre s’estompe. On parle désormais de l’été 2022. Le modèle c’est Israël que nous avons déjà dépassé en terme de vaccination et qui s’oriente vers une vaccination périodique garant d’une vie normale sans que cela ne choque personne, du moins pas ceux qui jouent le jeu de ce contrôle à la chinoise. Ouvrons les yeux ! je n’ai pas le droit de jouer au golf ! Je n’ai pas le droit de prendre un thé assis en terrasse mais je peux le déguster à emporter sur un banc situé à moins d’un mètre de la même terrasse. Et personne ne dit rien ! Aujourd’hui je suis un paria. Demain d’autres le deviendront à leur tour parce que la nécessité d’une troisième ou d’une quatrième dose leur semblera tout d’un coup très risquée au vu des remontées de pharmacovigilance qu’on ne pourra pas masquer éternellement.

Un jour la page se tournera. Un jour ce moment d’hystérie collective sera derrière nous. Mais que restera-t-il dans nos mémoires ? Pourrons-nous oublier que nous fument devenus des intouchables dans une société hyper individualiste prête à tout pour continuer son petit train train de consommateurs lobotomisés ? Régression mentale et intellectuelle. Comment les Allemands tournèrent-ils la page en 1946 quand il fallut regarder l’avenir tachés du sang des victimes du nazismes dont beaucoup furent les complices passifs. Les pendus de Nuremberg suffirent-ils au peuple allemand pour se regarder dans la glace ? En France de jeunes adolescents meurent parce que des adultes pétris de trouille ont choisi de partir en Vacances en Corse et de continuer à boire leur petit café du matin comme si de rien n’était. Je me demande souvent ce que je ressens pour ces gens qui restent enfermés dans leur vie sans se rendre compte des conséquences de leur ignorance, de leur bêtise ou de leur égoïsme ? Un mélange indicible de dégout et de colère. Pourtant il faudra bien oublier. Oublier sans procès. Oublier sans pendus. Oublier la serveuse zélée. Oublier les chaines. Oublier les regards. Oublier les petites lâchetés. Ou bien partir.

(1) FAUT-IL VACCINER CONTRE LA DÉTECTION PAR PCR OU CONTRE LA MALADIE COVID-19 ?

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